Erasmus : Le mouvement migratoire de la jeunesse

Erasmus, les étudiants français en sont les premiers bénéficiaires en Europe. photo D.-R.

Tous les mouvements migratoires ne sont pas dictés par la peur ou la misère. On recense ainsi des milliers de personnes qui s’éloignent de leur pays d’origine pour conquérir un nouvel endroit, emplis de rêves et d’espoir. Les jeunes composent une part importante de cette population voyageuse. Ce qui pose parfois des problèmes inattendus, notamment dans la région…

Attirés par de plus grands espaces ou la tête remplie d’un désir d’aventures, les jeunes de moins de 30 ans sont de plus en plus mobiles, désireux de quitter le nid familial en déployant leurs ailes. Etudes, vie professionnelle, amour, cette forme de migration est omniprésente dès qu’on parle des étudiants (la France est devenue depuis 2014 le pays qui envoie le plus d’étudiants en mobilité, via le programme Erasmus) ou encore des jeunes cadres. Mais elle pèse de plus en plus lourdement sur l’économie française et même sur l’avenir du pays.

Déçus par le système français…

Le lycée Saint-Louis de Gonzague, établissement d’excellence à Perpignan.

A Perpignan, on dénombre pas moins de huit lycées, dont certains sont classés parmi les meilleurs de la région comme c’est la cas avec le lycée de Saint-Louis de Gonzague. L’éducation y est exigeante, les cours sont intenses et la sélection est de rigueur pour ne conserver que les meilleurs élèves. Mais à la sortie du bac, que se passent-ils vraiment pour ces étudiants à qui on a promis monts et merveilles ?

L’université Perpignan Via Domitia ne proposant que peu de cursus, tous ces nouveaux bacheliers se tournent vers des études supérieurs et des écoles dans d’autres villes de France. Ils partent étudier la médecine à Grenoble, Bordeaux, le commerce à Paris ou encore les lettres à Toulouse. Ce petit flux migratoire n’est cependant que le prémisse à de plus grands changements. Mais la ville de Perpignan perd déjà plus de la moitié d’une population active. Devenus indépendants, ces étudiants voient plus grands et déçus du système scolaire français, ils décident de tenter leur chance à l’étranger.

Julie a 23 ans, elle a obtenu son bac S avec mention et a tenté sa chance en fac de médecine à Lyon. “Le rythme était intense, à part dormir et manger, tous les autres moments sont de la révision. On ne voit plus le jour, on ne vit plus. C’est là que je me suis dit que je devais partir à l’étranger.” Les études de médecine sont réputées pour être très compliquées en France alors que dans d’autres pays européens, le diplôme s’obtient beaucoup plus facilement : “J’ai décidé de partir à Cluj en Roumanie. Il y a une grande communauté française. J’ai même retrouvé des camarades de classe du lycée. La vie est clémente. Je m’y sens bien, c’est un environnement parfait pour étudier.”

Médecine en Roumanie, kiné à Barcelone, etc

Les étudiants d’Occitanie voient de nouvelles perspectives en partant à l’étranger… Photo D.-R.

Cette émigration étudiante n’est pas nouvelle mais elle prend de plus en plus d’ampleur. Le programme Erasmus lancé en 1987 a été une porte ouverte qui,  depuis, ne s’est jamais fermée. Manon, 21 ans, originaire de Montpellier, est partie faire ses études au Canada. “La sélection pour Sciences-Politique en France est bien trop compliquée. Aller à Montréal était mon seul choix et je ne suis pas déçue. Les études sont un peu plus longues pour les français mais le système éducatif est beaucoup mieux”, explique-t-elle

Antoine, 22 ans, lui est parti en Espagne étudier la kinésithérapie. “J’étais à Perpignan et j’étais obligé de m’éloigner pour pouvoir suivre mes rêves. Soit je déménageais à l’autre bout de la France sans savoir si j’allais réussir, soit j’allais à Barcelone où les cours ne sont pas dans ma langue mais où les études sont moins longues. Le choix a vite été fait. A Barcelone, je ne suis pas loin de chez moi, j’apprends de nouvelles langues tout en apprenant un métier. Je pourrais travailler partout dans le monde à la fin de mes études.”

Toutes les villes de l’Occitanie se retrouvent impactées par cette migration des talents. A part Montpellier et Toulouse qui défendent leur place en tant que cités étudiantes, toutes les autres voient partir leurs jeunes et ceux-ci ne reviennent presque jamais. “On a découvert la vie active dans des villes plus attrayantes que nos villes d’origines. A Perpignan, il n’y a pas d’emplois, pas de moyens pour implanter de nouvelles entreprises. On ne va pas tenter de revenir si on sait à l’avance qu’on va échouer. Et même en France, c’est très difficile de vivre après des études. L’étranger nous offre bien plus de possibilités”, déclare Romain, étudiant en marketing.

Fanny RIGAL