Maltraitance animale : Les infractions sont en forte hausse entre 2016 et 2021

Les Français sont plus sensibles à la cause animale et dénoncent plus volontiers mauvais traitements, sévices graves, abandons… Les services de police et de gendarmerie ont d’ailleurs enregistré pas moins de 12 000 infractions envers les animaux domestiques en 2021. Plusieurs départements d’Occitanie se distinguent malheureusement… Le ministère de l’Intérieur vient de créer une brigade spécialisée, initiative saluée par la Fondation Bardot.

En 2021, les services de police et de gendarmerie nationales ont enregistré pas moins de 12 000 infractions (9 200 en 2016) visant des animaux domestiques, “apprivoisés ou tenus en captivité”. C’est un nombre en augmentation de 30 % par rapport à 2016 (soit + 5 % en moyenne par an). Parmi ces infractions, 35 % correspondent à des mauvais traitements, 34 % à des sévices graves, 14 % à des atteintes involontaires à la vie et à l’intégrité de l’animal et 5 % à des abandons, selon une étude du ministère de l’Intérieur, publiée le 26 octobre dernier. Et plus précisément de son service statistique, le SSMSI.

Nouveau service dédié à la lutte contre la maltraitance

Chiens abandonnés… DR.

Le ministre de l’Intérieur, Gérald Darmanin a profité de cette nouvelle étude pour annoncer la création d’un nouveau service spécialisé dans la lutte contre la maltraitance animale de quinze enquêteurs, policiers et gendarmes, tous rattachés à l’Office central de lutte contre les atteintes à l’environnement et à la santé publique. Une initiative saluée par la Fondation Brigitte-Bardot car jusqu’à maintenant peu de plaintes pour actes de cruauté étaient suivies d’une enquête et encore moins pour de poursuites. On se souvient tous des mutilations d’équidés et de l’émoi que cela avait suscité mais cet événement médiatique cache une multitude de maltraitances au quotidien, dans le secret des habitations.

Les Français davantage sensible à la cause animale

Les Français sont davantage sensibles à la cause animale et dénoncent plus volontiers les actes de maltraitance qui sont donc mieux repérés. Ces infractions visant les animaux sont majoritairement présentes dans les zones rurales, “en raison de la prise en compte des animaux d’élevage peu présents en zone urbaine”, explique-t-on. S’agissant des seuls délits visant les animaux domestiques enregistrés en 2021, un quart des plaignants sont des personnes morales. À l’inverse, presque la totalité des mis en cause sont des personnes physiques, il s’agit pour les trois quarts d’hommes et 18 % ont plus de 60 ans contre 4 % des mis en cause pour l’ensemble des délits.

Chiens et chats les premières victimes

Les premières victimes, et ce n’est pas une surprise, que ce soient des mauvais traitements, sévices graves, atteintes involontaires et abandons sont les chiens (46 %), suivis des chats (24 %). En grande majorité, les auteurs sont des hommes à 73 %, âgés en moyenne de 30 ans à 44 ans. Néanmoins les espèces victimes diffèrent selon les caractéristiques des territoires. Cependant, “les équidés et bovidés sont davantage victimes dans les communes de moins de 20 000 habitants, que dans celles de plus de 20 000 habitants”.

Mauvais traitements dans les deux-tiers des cas

Au sein de ces procédures, les animaux sont principalement victimes de violences physiques (38 %), de mauvaises conditions (12 %) et d’abandons (8 %). Les violences physiques touchent en majorité les chats (50 %), alors que les victimes de mauvaises conditions sont des chiens dans plus des trois quarts des cas. Dans le détail, pour plus des deux tiers de ces infractions, il s’agit plus précisément de mauvais traitements (35 %) et de sévices graves (34 %) qui sont les plus fréquemment constatés. Cette première catégorie regroupe les mauvais traitements, la privation de soins et de nourriture, les atteintes volontaires et le placement d’animaux dans des habitats pouvant être cause de souffrance. Les sévices graves regroupent également les sévices de nature sexuelle et les actes de cruauté.

Explosion des abandons

Certes, les abandons ne concernent que 5 % des atteintes envers les animaux domestiques, mais cela ne doit pas cacher le fait que leur nombre a explosé en cinq ans avec une hausse vertigineuse de 95 % pour atteindre 630 infractions dûment enregistrées en 2021. Ce que confirment nombre d’associations de protection animale, notamment au cours de la crise sanitaire. Ces atteintes aux animaux sont particulièrement – en proportion – plus nombreuses en zones rurales. Notamment, en Occitanie, l’Ariège, l’Aveyron ou la Lozère figurent en “bonne” place parmi les quatorze départements où ces maltraitances sont les plus fréquentes.

Olivier SCHLAMA

  • Les animaux de compagnie sont définis par l’article L.214-6 du code rural et de la pêche maritime comme “tout animal détenu ou destiné à être détenu par l’homme pour son agrément” et les animaux domestiques sont définis par la liste de l’arrêté du 11 août 2006. Les animaux apprivoisés ou tenus en captivité sont protégés au même titre que les animaux domestiques depuis la loi du 19 novembre 1963. “Selon la jurisprudence, la captivité peut valoir tant pour les animaux sauvages que pour les animaux domestiques. La définition de l’animal apprivoisé est plus délicate” (Chain-Larché, 2021, p. 115).

Battus, conditions de vie, abandon…

Animaux battus. Les animaux battus, frappés et tapés qui sont victimes le sont par des coups et de gifles mais également des maltraitances plus précises comme l’étranglement, la défenestration, la décapitation, les brûlures, les mutilations, la noyade, l’asphyxie, l’égorgement, etc., précise l’étude du ministère de l’Intérieur. Une arme a été utilisée dans 69 % des cas de violences physiques. Cet usage est davantage marqué dans les communes de moins de 20 000 habitants que dans celles de plus de 20 000 habitants, avec respectivement 79 % et 52 % des procédures de violences physiques faisant état de l’utilisation d’une arme. “Ceci s’explique notamment par la part relativement importante des blessures par plomb au sein de cette catégorie dans les unités urbaines de moins de 20 000 habitants : 60 % de ces victimes ont été touchées par du plomb contre 49 % dans les unités urbaines de plus de 20 000 habitants.”

Chaque année, ce sont près de 40 000 chiens et chats qui sont abandonnés sur la route des vacances. Photo Pauline CODINA

Insalubrité. La catégorie “mauvaises conditions” de vie correspond au maintien d’animaux dans un espace insalubre ou inadapté, ou qui ne répond pas à leurs besoins vitaux (par exemple un manque d’eau et de nourriture). Cette maltraitance est la deuxième forme la plus fréquente (12 %). Les mauvaises conditions sont plus fréquentes dans les unités urbaines de plus de 20 000 habitants (15 %) que dans celles de moins de 20 000 habitants (9 %). “Cela pourrait être lié au nombre plus important d’appartements en zone urbaine et ainsi au manque d’espace.”

L’abandon peut également avoir lieu dans des logements suite à un déménagement par exemple. Des empoisonnements ont pu être mis en évidence dans 8 % des procédures. “Il s’agit de la deuxième forme de maltraitance la plus fréquente dans les unités urbaines de moins de 20 000 habitants (10 %). Dans les unités urbaines de plus de 20 000 habitants, en revanche, cette forme de maltraitance est bien moins fréquente (4 %). Cela peut en partie s’expliquer par le mode opératoire qui semble plus adapté à des zones moins urbaines. En effet, l’empoisonnement est souvent effectué par la dispersion de boulettes de viande mélangées à des produits toxiques ou la présence de mort aux rats dans les lieux de promenade des animaux (la forêt, les espaces extérieurs publics ou les jardins privés des voisins).”

La volonté de nuire aux animaux errants et aux animaux de compagnie des voisins qui importunent certains au quotidien par leurs aboiements par exemple sont parmi les motivations les plus fréquemment exprimées. Le partage des espaces extérieurs et les animaux en divagation ou en semi-liberté pourraient expliquer la plus grande utilisation de l’empoisonnement parmi les délits commis dans les communes de moins de 20 000 habitants.

Et même des pièges. L’ usage de pièges se retrouve dans 2 % des procédures. Cet acte consiste dans la plupart des cas à installer un piège dans un jardin pour faire face aux animaux perçus comme des nuisibles. Ces actes sont plus fréquemment observés en zones rurales (3 %), qu’en zones urbaines (1 %).

Et les atteintes sexuelles sont minoritaires parmi les formes de maltraitance employées envers les animaux domestiques (1 % des délits). Cela pourrait en partie être dû à la difficulté d’identifier ces actes. “Ce n’est que depuis la loi n° 2021-1539 du 30 novembre 2021 que le secret professionnel du vétérinaire pour signaler les actes commis envers les animaux a été levé, y compris pour sévices de nature sexuelle. Aussi, cette loi crée le délit d’atteintes sexuelles se substituant aux sévices de nature sexuelle et permettant de rendre pénalement répréhensibles un plus grand nombre de comportements” (Chain-Larché, 2021), comme les actes sexuels commis sans contrainte ni pénétration.