Législatives : Les candidats interpellés sur l’avenir des langues régionales

La Felco, Fédération nationale des enseignants et culture d’Oc, engagée depuis trois ans au sein du collectif national Pour que vivent nos languesqui milite pour une meilleure reconnaissance des langues régionales, publie une carte interactive mise à jour en temps réel sur la position des candidats à la députation. Avec une série de questions à même de comprendre leur positionnement. Une première.

C’est une carte interactive inédite, ICI.  Doublée d’une démarche tout aussi inédite : sonder les candidats à la députation sur l’avenir des langues régionales – et pas seulement sur la question de l’enseignement mais aussi sur la création artistique et même de la place dans les médias –, dont le premier tour se joue ce dimanche 12 juin.Pour sa part, la Felco, la Fédération des enseignants et culture d’Oc – enseignement public, promeut, en Occitanie, notre langue régionale, l’occitan, balloté depuis des lustres par les gouvernements successifs.

“Dire aux candidats que l’on existe !”

Tout part d’un collectif, Pour que vivent nos langues, qui regroupe depuis 2019 des associations de diverses langues régionales ; des associations culturelles, des parents, etc. et “déjà pour dire aux candidats aux législatives que l’on existe ! Et informer les électeurs sur ce sujet”, souligne Julien Konopnicki. Secrétaire du Creo Languedoc (Centre régional des enseignants occitans) et lui-même prof d’occitan à Sète.

Le thème des langues régionales transcende les partis politiques. Ce n’est pas un sujet de gauche ou de droite”

Manifs… DR.

Cette carte interactive recueille les réponses des candidats contactés par la Felco et les autres associations de langues régionales, au moins 1 180 ayant ainsi été sondés – à l’exception de ceux d’extrême-droite – avec déjà plus de trois cents réponses à ce jour, d’autres candidats le seront jusqu’au second tour des législatives. “Les réponses sont très disparates.” D’après ces premiers retours, souligne Julien Konopnicki, “le thème des langues régionales transcende les partis politiques. Ce n’est pas un sujet de gauche ou de droite. À chaque fois, le gouvernement nous renvoie sur l’article 2 de la constitution qui dit que le Français est la langue officielle de la République alors que l’on voit de l’anglais partout, même dans la communication officielle du gouvernement et nous, dès que l’on a une avancée, on dit que l’on menace la République…”, déplore Julien Konopnicki.

Les réponses sont transpartisanes. On relève de tout : des favorables et défavorables à la diffusion des langues régionales dans tous les partis (…) On observe une personnalisation des réponses qui n’obéissent pas forcément aux directives nationales de leur parti”

Olivier Pasquetti, président de la Felco

Le Niçois Olivier Pasquetti, par ailleurs prof d’occitan, est président de la Felco. Il dit : “Nous sommes en train de rédiger une analyse écrite mais, déjà, nous tirons plusieurs enseignements de cette initiative. Les réponses sont transpartisanes. On relève de tout : des favorables et défavorables à la diffusion des langues régionales dans tous les partis (…) On observe une personnalisation des réponses qui n’obéissent pas forcément aux directives nationales de leur parti.” A LIRE ICI : L’analyse des 200 premières réponses.

Indépendance d’esprit des candidats

Manif à Paris. DR.

Il donne un exemple parlant : “C’est-à-dire que même si Jean-Luc Mélenchon s’était montré hostile envers les langues régionales en France, ce n’est pas le cas de certains de ses candidats aux législatives de son parti. Il y a une indépendance d’esprit des candidats face à cette question. Et une appropriation.” Et puis, on est face à la réalité des territoires qu’un député est censé représenter au plus près. “Oui, convient Olivier Pasquetti mais pas seulement : regardez pour le vote de la loi Molac ; 100 députés En Marche avaient voté pour la loi alors que le gouvernement avait tout fait pour que tous ces députés de la majorité votent contre !”

L’Hérault, l’Aveyron, le Gard, l’Aude ont bien répondu

Ce questionnaire aux candidats aux législatives fait suite aux réformes du bac mises en oeuvre par l’ancien ministre de l’Education nationale, Jean-Michel Blanquer, qui “a mis à mal l’enseignement des langues régionales. “Il y a eu des manifestations. Pour la présidentielle, on avait adressé un questionnaire aux candidats. Cette fois, c’est aux candidats aux législatives. Principalement sur les territoires où se parlent des langues régionales, notamment Bretagne, Pays Basque, Occitanie, Alsace, Corse”, explique Julien Konopnicki. Dans la région Occitanie, l’Hérault, l’Aveyron, le Gard, l’Aude, comptent parmi les départements qui ont bien répondu. En revanche, pas ou peu de réponses, bizarrement, des Catalans.

“Un intérêt pour les langues régionales surtout depuis la loi Molac”

Manif à Sète… DR.

Secrétaire du Créo donc et lui-même prof d’occitan à Sète, il fait référence à “la censure partielle de la loi Molac en mai 2021 montrant que l’interprétation par le Conseil constitutionnel des articles 2 et 75-1 de la Constitution pouvait entraver le développement des langues régionales souhaité par une grande partie de la population et des élus”, comme Dis-Leur vous l’a expliqué ICI. 

Un sentiment émerge : “On ressent un intérêt pour les langues régionales surtout depuis la loi Molac.” Ce travail est en perpétuelle évolution mais il contient déjà les réponses de candidats d’une centaine de circonscriptions – sur les 577 circonscriptions de l’Hexagone – auscultées sur le thème des langues régionales et de leur avenir. Exemple, celui du député sortant Euzet (7e de l’Hérault), rapporteur d’une loi sur les langues régionales ICI et les accents, comme Dis-Leur vous l’avez expliqué ICI.

Sept questions précises ont été posées

Lui comme des centaines de candidats se sont vu questionner précisément sur ce qu’il compte faire pour une révision de la constitution en faveur des langues régionales ? Et quelles modifications propose-t-il ? Y compris pour une reconnaissance des langues régionales ? Y compris en Europe ? Ainsi sept questions très précises ont été posées, comme sur l’insuffisance de moyens dédiés, de l’oubli de ses spécificités lors des réformes successives, de la mise en concurrence avec d’autres enseignements.

De la République en Marche au PCF, même combat

Manif à Albi. DR.

Sur la possibilité d’octroyer un statut, une place et des moyens ministériels spécifiques pour les langues régionales dans l’enseignement ? quel place faut-il faire aux langues régionales dans la vie publique ?

Le député et candidat Euzet est favorable à la plupart des propositions. Il ajoute, même, en abondant : “Lorsque l’épidémie de Covid est arrivée en France, nous discutions en Commission des Lois sur un texte relatif à l’audiovisuel. À cette occasion, j’avais déposé des amendements visant à promouvoir la diversité des langues et des accents dans les médias, en allouant des crédits spécifiques pour ce sujet.” Son concurrent de la Nupes-PCF, Gabriel Blasco, a dit oui à toutes les questions du collectif, ajoutant : “Les langues de France dites régionales sont un élément important de la culture et, à ce titre, elles doivent bénéficier des moyens nécessaires pour vivre et se développer.”

Aveyron, Haute-Garonne, Ariège…

Dans la 3e circonscription de l’Aveyron, autre exemple, le candidat de Résistons (Jean Lassalle) est pleinement favorable à enrichir la place des langues régionales ; dans la 8e de la Haute-Garonne, le candidat PS refuserait, une fois élu, curieusement, de s’engager, au sein de son groupe politique, de faire respecter la circulaire du 16 décembre 2021, le fameux texte précisant les modalités de l’enseignement en immersion… De la même façon, la candidate de Pour l’avenir de l’Ariège et de l’Occitanie dans la 1er circonscription de l’Ariège, elle aussi a répondu favorablement à toutes les questions.

Olivier SCHLAMA

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