Hissez haut ! : Pourquoi le nautisme a le vent en poupe

Survol du port du Cap d'Agde. Photo : Renaud Dupuy de la Grandrive.

Très attendu, le salon nautique du Cap d’Agde, 4e français, fait le plein. Il est l’exemple de l’engouement des Français pour le nautisme sous toutes ses formes. “Nous sommes dans une bonne dynamique”, explique l’organisateur Jean-Pierre Boyer. “On voit l’avenir avec confiance”, confie la grand-mottoise Colette Certoux, vice-présidente de la Fédération des industries nautiques. Explications.

La filière nautique sait essuyer les tempêtes. Celle, météorologique, qui s’abat en ce moment sur le Golfe du Lion comme celle du covid-19. Le vent violent qui fait danser bruyamment les drisses ajoute au charme de la voile et à l’envie de grand large, au salon nautique du Cap d’Agde qui se déroule jusqu’à demain inclus (entrée gratuite) et qui “fait le plein de visiteurs”, malgré une météo peu engageante. La commissaire de l’événement, Liliana Costanza, évoque des chiffres similaires à 2019, d’avant-crise et garde un cap très dynamique : “Les deux premiers jours, nous avons reçu 5 000 visiteurs pour chaque journée. Nous avons été même surpris : malgré la météo, des gens attendaient devant les grilles avant l’ouverture.”

“Cela n’a rien à voir avec les salons virtuels…”

Ph R. Dupuy de la Grandrive.

Une soif visible qui a ses raisons : “Cette 22e édition était très attendue ; en chair et en os, cela n’a rien à voir avec les salons virtuels organisés depuis un an et demi. Les nouveautés, les conseils, les échanges avec les professionnels ne peuvent vraiment se dérouler que lors d’un salon en présentiel…” Reconnu nationalement, le salon nautique du Cap se hisse au 4e rang français – après Cannes, Paris, et la Rochelle – avec ses 400 bateaux présentés, neufs et d’occasion.

L’occasion est un marché devenu très tendu dont les prix sont à la hausse de 10 %”

Jean-Pierre Boyer

Président de l’association locale des professionnels du nautisme qui compte 23 entreprises adhérentes, lui-même gérant du magasin shipchandler Navicap, Jean-Pierre Boyer dit : “Nous sommes dans une bonne dynamique cette année ; c’est un salon qui a aussi une belle diversité d’exposants. À noter que l’occasion est un marché devenu très tendu dont les prix sont à la hausse, d’environ 10 %.” En cause, comme pour l’ensemble de l’économie : la raréfaction de certains matières premières et composants de base. Jean-Pierre Boyer confirme : “La filière nautique n’a pas énormément souffert de la crise, si ce n’est, effectivement, dans la partie fabrication. On constate également un manque de main d’oeuvre. D’où des clients qui se reportent sur l’occasion.”

Pas besoin de passe sanitaire…

22e salon nautique du Cap d’Agde. Ph. Renaud Dupuy de la Grandrive

La mer représente toujours un espace inégalé de liberté, encore davantage depuis les confinements. “Depuis 18 mois, les gens ont pu beaucoup moins voyager, ajoute Jean-Pierre Boyer, ils se sont recentrés, pour beaucoup, sur la France ; ils se sont souvenus qu’il y avait de jolis coins et d’extraordinaires plans d’eau. Et que pour voyager en bateau, on n’a pas besoin de passe sanitaire, d’attestation pour voyager, etc.”

Chiffre d’affaires baisse mais l’export se maintient

Le chiffre d’affaires de l’ensemble de la filière nautique en France en 2020 s’élève à 4,7 milliards d’euros, soit une baisse de 11,5 % par rapport à l’année précédente. Si la Fédération des industries nautiques (Fin) observe également un recul contenu de l’emploi à 5,4 %, portant le nombre d’emplois directs à 41 361 personnes, le taux d’export des bateaux neufs se maintient au niveau exceptionnel de 76 %. C’est l’un des points forts jamais démentis de l’économie maritime. La France compte quelque 13 millions de plaisanciers occasionnels, délivre bon an mal an 100 000 permis bateau et compte 473 installations portuaires pour 250 000 anneaux. En 2015, comme l’avait analysé l’Insee, la France était le leader européen de la construction de voiliers

L’Occitanie se place au 6e rang français

Brecou… Ph. Renaud Dupuy de la Grandrive

“Après une saison estivale 2020 très positive en France, l’engouement des Français pour les activités nautiques ne s’est pas démenti cet été”, explique-t-on encore au Fin. La Méditerranée (Paca, auvergne, Rhône-Alpes, Occitanie, Corse génère 1,58 milliard d’euros de chiffre d’affaires, soit 33 ,3 % du total national et 35,3 % des effectifs (14 601). Les entreprises situées en Région Sud-Paca représentent près d’un quart du chiffre d’affaires national et des salariés de la plaisance. L’Occitanie représente 7,2 % de ce chiffre d’affaires et 6,8 % des emplois nationaux de cette branche et se hisse au 6e rang français en terme de chiffre d’affaires, d’emploi et en nombre de sociétés.

“Une forme d’équilibre du nautisme en Occitanie”

Eric Mabo, secrétaire général adjoint de la Fin, décrypte le marché. “L’Occitanie a une particularité : c’est l’une des rares régions françaises où l’on retrouve toutes les dimensions d’une industrie de construction. Des équipements de très grande qualité, avec des équipements et de sports de plaisance, c’est historique et une pratique multiple et soutenue. Du kite surf à la grand-voile. C’est moins vrai dans les Pays de la Loire, par exemple au second rang français, où il y a moins de pratique et davantage de constructions. Et pour Paca, première région de France, à lui tout seul, c’est 25 % du chiffre d’affaires de la filière française, eh bien on y construit pratiquement pas un bateau mais on y navigue énormément. On y trouve donc toutes les entreprises de services, de vente, de distribution et de maintenance qui forment le gros des troupes. Il y a donc une forme d’équilibre en Occitanie que l’on retrouve en Bretagne et Nouvelle-Aquitaine mais pas dans toutes les régions. On y trouve une industrie nautique de grande qualité mais pas une production massive…”

“De bon augure avant Paris et Amsterdam”

Ph. Renaud Dupuy de la Grandrive. Bateaux, voilier, Méditerranée.

En tout cas, les salons ont montré la voie d’une économie résiliente. “Cannes, le premier salon organisé en présentiel cette année, s’était déjà très bien passé.” Comme celui du Cap. “C’est de bon augure avant les Nautiques de Paris et le Meets d’Amsterdam dans 15 jours que le Fin, la Fédération des industries nautiques, organise”, souligne la grand-mottoise Colette Certoux qui en est la vice-présidente et également vice-présidente du Parlement de la Mer, émanation participative de la Région Occitanie.

Fière que sa fédération ait accueilli au Yachting Festival de Cannes, il y a un mois, Annick Girardin, ministre de la Mer, et Guillaume Sellier, directeur inter-régional au ministère de la Mer Nord Atlantique et Manche ouest qui se sont montrés très concernés par l’avenir de la filière. Preuve que le gouvernement, à l’affût des relais de croissance, mise sur cette industrie en plein essor. Une ministre qui a d’ailleurs confié une mission au président de la Fin sur le nautisme de demain, sur la transition écologique, notamment.

La production de multicoques s’envole

Port du Cap d’Agde. Ph. Renaud Dupuy de la Grandrive.

“La crise du covid avait ébranlé nos professions mais nous sommes en passe de retrouver les chiffres de 2019. Nous n’en sommes pas loin : nous formons l’espoir que ce sera le cas d’ici le Salon de Paris. On voit l’avenir avec confiance et encore plus maintenant en cette fin d’année”, se félicite Colette Certoux, pointant la confirmation d’une réussite, celle “de la production du multicoque régional qui s’envole”. On connaît ses pépites régionales avec Outremer, à la Grande-Motte, et Bali-Catamarans de Catana, à Canet-en-Roussillon.

Des difficultés à recruter dans les chantiers

“L’engouement des Français pour la plaisance est incontestable. Les gens achètent bateaux et équipements”, certifie également Eric Mabo. Le secrétaire général adjoint de la Fin signale lui aussi un problème de main d’oeuvre et de main d’oeuvre qualifiée dans les chantiers pour faire face aux commandes. “Nous avons des difficultés à recruter, ce n’est pas propre à notre industrie, nombre de secteurs sont concernés”. Des commandes qui partent le plus clair du temps à l’exportation.

Pour de grandes sociétés de location dans le monde

22e salon nautique du Cap d’Agde Ph. Renaud Dupuy de la Grandrive

Eric Mabo confie encore : “Le segment du multicoque marche fort. Il comporte deux sous-segments : celui des bateaux de grandes productions – la marque Bali, par exemple, ce sont quelque 400 bateaux de 40 pieds à 60 pieds produits annuellement. Ces société de production en nombre ont souvent comme clientes de grandes sociétés de location de bateaux présentes à travers le monde. L’un des supports de la croissance du marché du catamaran c’est bien la location. En Méditerranée, notamment dans les ports occitans, il n’y a pas beaucoup de catamarans, alors que c’est une zone de production importante : 80 % de la production française est exportée. Dans l’autre sous-segment multicoque, il y a les bateaux dit de voyage (Outremer, par exemple) qui ne livre qu’un ou deux bateaux par mois maximum.”

Accompagner le tissu de petites entreprises

Mais le regard de Colette Certoux se tourne déjà vers 2022. “L’année prochaine est un vrai enjeu. Nous avons accueilli beaucoup de nouveau pratiquants dans les différents segments du nautisme. Il faut consolider cela.” Il faut aussi accompagner le tissu de petites entreprises du nautisme qui sont l’une des particularités du littoral d’Occitanie. “Il faut aussi, et la crise a montré cette défaillance-là, faire passer nos entreprises qui ont souvent un problème avec la digitalisation, pleinement au e-commerce jusqu’à leur propre gestion digitalisée. Ce sont, d’ailleurs, des préoccupations dont nous avons tenu compte dès le plan de relance régional avec des webinaires très bien faits.”

Olivier SCHLAMA

Chiffres-clés du nautisme en 2020 :

5 658 entreprises
30 catégories d’entreprises
41 361 salariés
4,7 milliards d’euros en chiffres d’affaires
Nouveaux bateaux construits :
3 538 voiliers
9 745 bateaux à moteur
Taux d’export à 76 %
10 913 ventes de bateaux neufs
47 % bateaux de moins de 6 mètres
77. % bateaux à moteur
79 677 ventes de bateaux d’occasion :
58 % bateaux de moins de 6 mètres
79 % bateaux à moteur
4 millions de plaisanciers réguliers
11 millions de pratiquants de sports nautiques (Surf, sport de glisse, planche à voile, stand-up paddle, canoë kayak, ….)
+ de 4 000 centres nautiques
Source : Fédération des Industries Nautiques – Indicateurs 2020

Conférences et expo marines de Renaud Dupuy de la Grandrive

Escales marines naturalistes autour de la Méditerranée, les dimanche 31 octobre 16 heures et lundi 1er novembre 11 heures et une expo jusqu’au lundi 1er novembre.

Au travers de ses photographies sous-marines, aériennes et littorales, Renaud Dupuy de la Grandrive vous embarquera des confins des rivages méconnus de la Méditerranée orientale, en Syrie et en Turquie à ceux de la Méditerranée occidentale en passant par l’Afrique du Nord, particulièrement en Libye et en Algérie.

Trésors du patrimoine

Dauphins… Au large d’Agde… 22e salon nautique du Cap d’Agde. Ph. Renaud Dupuy de la Grandrive.

Un périple pour découvrir aussi une autre Méditerranée et ses richesses en biodiversité marine. Ses aventures, personnelles ou professionnelles menées sous l’égide des Nations unies pour l’environnement avec Mathieu Foulquié sont souvent passées dans le sillage des aires marines protégées méditerranéennes, là où s’expriment le mieux les trésors en patrimoine naturel. Un tour du monde méditerranéen aux nombreuses péripéties dont le parcours photographique n’oubliera pas les rivages et le milieu marin de la région Occitanie et notamment ceux de la côte agathoise.

La conférence est suivie d’une séance de dédicaces de ses deux ouvrages photographiques Agde, voyage miair-mieau et Méditerranées, dans le sillage des aires marines protégées.

Agde, Tamarissière…

Exposition photographique au Salon Nautique du Cap d’Agde baptisée Images dans le sillage du littoral agathois. Au travers d’une trentaine de ses photographies, Renaud Dupuy de la Grandrive vous emmène tout au long du littoral d’Agde, du Cap d’Agde, du Grau d’Agde et de la Tamarissière, par tous les temps et toutes les saisons, sous l’eau, sur l’eau, à terre et depuis les airs.
À découvrir jusqu’à lundi 1er novembre 18 heures dans le chapiteau central du salon nautique.