Foot et BD (3) : La règle des 3 selon Raymond Reding

Eric Castel, le buteur né du crayon de Raymond Reding a cnquis tous les stades, et le Camp Nou a chaviré pour lui !

Parler de sport en bande dessinée, c’est forcément en venir à évoquer Raymond Reding, qui a laissé sa trace au coeur même de l’un des temple mythiques du football : le Nou Camp de Barcelone !

Le génial Paul Ordner n’ayant jamais réussi à s’adapter aux contraintes de la BD, il aura fallu attendre les années 60 et Raymond Reding pour que football et aventure se partagent enfin la vedette… En 2013, honneur suprême, son personnage Eric Castel entre au panthéon du Barça (le FC Barcelone) qui lui consacre deux entrées sur son site officiel (voir ICI).

Un trio d’attaquants dans les plus grands clubs

Mais tout a commencé bien plus tôt et un flash-back s’impose : Reding crée d’abord Jari (un joueur de tennis) en 1957 pour Le journal de Tintin, mais il maîtrise le ballon de cuir mieux encore que la petite balle jaune, comme le prouve un album de la série, Le troisième goal, en 1962. Un an plus tard l’auteur – né en Normandie (1920) et décédé à Anderlecht (Belgique) en 1999 – lance son premier buteur dans l’arène.

Raymond Reding a en effet offert à la bande dessinée un trio d’attaquants dignes de la MSN du Barça, qui évolueront dans les plus grands clubs ! 1963 : Vincent Larcher (7 albums : Valenciennes FC, Milan AC) ; 1979 : Eric Castel (15 albums : FC Barcelone, PSG, Lille OSC, sur des scénarios de Françoise Hugues), connu d’abord en Allemagne sous le nom de Kai Falke et en 1982 : Pierre Laurent dit Pierrot L’Anderlechtois (1 album de la série Section R : RSC Anderlecht ).

Vincent Larcher, foot et fantastique

Le premier en action est donc Vincent Larcher (apparition Journal de Tintin en 1963). Classique et populaire, ce sont sans doute les deux mots qui peuvent le mieux définir le travail de Raymond Reding. Dans les années 60, le héros de BD doit offrir un exemple et un ami de papier pour le jeune lecteur.

Comme ses autres personnages, Vincent Larcher est donc un héros exemplaire, pas une icône inaccessible mais un modèle idéaliste porteur de valeurs morales et dont les qualités déteignent sur son entourage et ceux qu’il croise.

Sans doute trop en avance sur son temps, Reding, sans oublier le football, va cependant donner une couleur fantastique à cette série avec l’arrivée d’un autre personnage, Olympio, géant mutant et ami de Larcher, faisant basculer leurs aventures dans une sorte d’onirisme surnaturel qui déstabilisera nombre de lecteurs. Difficile pourtant de ne pas compter des albums tels que Le Condottiere (1971, Le Lombard) ou Mini-jupes et Maxi-Foot (1972, Le Lombard) comme de véritables reportages sur les terres de deux grands d’Europe, l’AC Milan pour le premier et l’Ajax d’Amsterdam pour le second, offrant par ailleurs une place de premier plan à des femmes-footballeur qui ne manquent ni de talent, ni de caractère comme vont s’en apercevoir les champions du calcio

Visionnaire Reding ? Quelques années après la fin de carrière de Vincent Larcher, un autre champion va prendre sa place dans le coeur des supporters-bédéphiles. Eric Castel est un jeune footballeur français fraîchement arrivé au Barça (en provenance de… l’Inter de Milan). Fidèle aux valeurs véhiculées par son prédécesseur Larcher, le champion va se lier d’amitié avec une petite troupe d’apprentis-footballeurs, les Pablitos.

Sous les couleurs du FC Barcelone et du… PSG

Eric Castel, une icône du FC Barcelone ! signée Reding

Les bons sentiments sont toujours au rendez-vous au fil des 15 albums de la série entre 1979 et 1992 (chez Fleurus, puis Novedi et Dupuis). On fait souvent un parrallèle entre les héros de Reding et le pilote automobile Michel Vaillant de Jean Graton (qui a d’ailleurs croisé le chemin de Vincent Larcher dans un album). Le fair-play, la fidélité dans l’amitié, l’honnêteté sont incontestablement les dénominateurs communs de ces personnages et l’argent ne semble pas exister (ni le hooliganisme, d’ailleurs, pourtant déjà bien réel à l’époque) et les transferts se règlent d’une poignée de main. Mais la série de 15 albums offre un intéressant regard sur le football des années 80, se terminant trois ans avant la révolution libérale constituée par l’arrêt Bosman.

Par rapport à Vincent Larcher, l’époque a cependant évolué et Reding développe de façon plus élaborée les émotions et sentiments de Eric Castel, notamment avec la jeune joueuse de tennis Diane Chapuis, le redoutable (mais sensible) entraîneur britannique du Barça, CB Kerr, surnommé le « Chief » et le rival devenu ami, le yougoslave Stefan Stanovic… Sans oublier bien sur les Pablitos. Que c’était beau le sport avant le foot-business !

Un seul album pour l’Anderlechtois

La plus belle réussite de Raymond Reding, c’est sans doute sa série La Section R, contant les aventures d’un duo d’anciens sportifs devenus journalistes-enquêteurs. Huit albums entre 1975 et 1982 (Le Lombard, puis Bédéscope). C’est justement cette dernière date qui nous intéresse, avec le tome 8 : L’anderlechtois … Dans cet album, les deux héros Sophie Ravenne et Eric (Riva) rencontrent un passionné de foot qui brille sous le numéro 9 chaque dimanche sur les pelouses déglinguées de la Belgique profonde et rêve d’intégrer un jour le fameux RSC Anderlecht… Un rêve qui deviendra réalité après quelques péripéties en 48 planches? A chacun ses contes de fées !

Philippe MOURET

(*) Walter Müller, l’oublié : Avant Eric Castel, il y a eu le joueur d’un petit club amateur de Düsseldorf créé par Raymond Reding pour le magazine allemand Zack qui en commence la publication en juin 1974, Au moment de l’ouverture de la Coupe du Monde. Kai Falke dans Zack devient Walter Müller pour les éditions espagnoles, portugaise, finlandaise… Une seule aventure, Aux portes de Munich, publié en album aux Pays-Bas (1975, Helmand). Il n’y aura pas de suite pour le jeune footballeur allemand dont les cheveux vont blanchir et qui va devenir le célèbre Eric Castel dans les pages de la revue Super As (quatre-vingt sept parutions en 1979 et 1980), l’émanation de Zack en France.