Macron a annoncé le 13 avril la réouverture des écoles à partir du 11 mai. Le ministre de l’Éducation nationale en a précisé le calendrier. De nombreux enseignants, parents et élus montent au créneau. Une visio-conférence se tenait ce mardi depuis le rectorat où la question des conditions sanitaires préalables a été longuement abordée. Les syndicats d’enseignants n’excluent pas de faire jouer le droit de retrait.
“Très inquiets”, les membres d’un collectif montpelliérain dénoncent dans une pétition “un grand flou sur les modalités concrètes” ; sur le fait que les enfants sont “des vecteurs potentiels de l’épidémie” (les spécialistes sont revenus sur ce constat). Ils prennent exemple sur le premier tour des élections municipales : “On nous avait assuré que toutes les les précautions étaient prises, on sait aujourd’hui que ces élections ont propagé la contamination et que plusieurs maires sont décédés du covid-19.”
Ils ajoutent : “Nous aimerions tous retrouver nos élèves et notre travail. Nous avons tous conscience des effets néfastes de la déscolarisation sur nos élèves les plus fragiles (…) Faire la classe n’est pas une garderie…” Evidemment, ils pointent ce qui peut apparaître comme des incohérences : “Pourquoi rouvrir les cantines et pas les restaurants ? Comment appliquer la distanciation sociales avec des enfants ?“ Ils prônent, comme le maire Philippe Saurel, le “dépistage pour tous, protections”.
Il n’existe aucune certitude quant à la contagiosité du virus (…) Les scientifiques se contredisent chaque jour”
De la même manière, à Sète, un collectif s’est constitué à l’initiative d’une instit également maman de deux élèves, mettant en avant la possibilité d’un “droit de retrait” des enseignants. En plus des arguments précédents, le collectif assure qu’il “n’existe aucune certitude à ce jour quant à la contagiosité du virus (…) Les scientifiques se contredisent chaque jour.” Que l’ordre des médecins “déconseille cette réouverture des écoles (…) Une seconde vague encore plus dévastatrice que la première est déjà redoutée…”
Inquiétude et colère
Interrogée, Véronique Calueba-Rizzolo, vice-présidente du département de l’Hérault, elle-même institutrice, “soutient ce mouvement dans l’attente des conditions de reprise. Ils agissent dans une volonté de partage de la démocratie. Ils aimeraient mettre en oeuvre une sorte de grand conseil des écoles pour discuter avec le maire, l’Education nationale, etc. Les parents sont aussi plutôt réticents à mettre leurs enfants à l’école dès le mois de mai. Ils veulent être acteur de cette affaire”. De son côté, Alexis Gigord, coordinateur académique du Snui-ipp, confirme : “Il y a énormément d’inquiétude et même de colère autant des parents que des instits. Comment faire respecter les gestes barrière aux enfants de maternelle ? Impossible.”
Retours en classes échelonnés
Jean-Michel Blanquer, ministre de l’Education nationale, a détaillé les modalités d’un retour progressif à l’école “si les conditions sanitaires le permettent”, étalé sur trois semaines : d’abord les élèves de grande section, CP et CM2 (le 11 mai mais pas le lundi) ; puis, les élèves de 6e, de 3e et de 1er et de terminale (18 mai). Puis, dans un second temps, dès le 25 mai, l’ensemble des élèves avec à chaque fois un plafond de 15 élèves par classe. Plusieurs configurations de classe devraient coexister : en demi-groupes physiquement, en classe ; la même chose mais à distance ; un demi-groupe en autonomie possiblement. Les activités sportives et culturelles ne sont pas exclues.
Nous ne sommes pas opposés à la reprise des cours mais dans des conditions sanitaires acceptables. Et si on n’est pas convaincus, nous appellerons la profession à exercer son droit de retrait”
Anthony De Souza, co-secrétaire du SNUipp-FSU 34
C’est dans ce contexte que s’est tenu ce mardi un CDEN, comité départemental de l’Education nationale, en visio-conférence, réunissant les associations de parents d’élèves, les syndicats enseignants, des élus, etc. Anthony De Souza, co-secrétaire du SNUipp-FSU 34 y participait. “Le sujet nous a occupés pendant plus d’une heure après le point sur la carte scolaire, relate le syndicaliste. Les annonce de Jean-Michel Blanquer du jour ont suscité encore plus de questions.” Exemples : “La jauge maximale de 15 élèves, comment et qui décide des élèves qui iront ou non en classe ? Que faire des autres ? Suivront-ils la classe depuis chez eux, à distance ? Avec quel instit en face…?”
Se pose avec acuité la question sanitaire. De la distribution de masques, entre autres. “Il nous a été répondu que la semaine prochaine on connaîtrait le détail de ces mesures pour la réouverture des écoles. Ce sera dans le plan interministériel qui sera dévoilé et qui sera décliné au niveau départemental. Nous avons redemandé qu’il y ait un protocole national sur ce sujet. Nous ne sommes pas opposés à la reprise des cours mais dans des conditions sanitaires acceptables. Le Dasen, le directeur académique des services de l’Education nationale, a même dit à la surprise générale qu’une désinfection des locaux était inutile… Et si on n’est pas convaincus, nous appellerons la profession à exercer son droit de retrait. Mais une reprise en mai cela reste inquiétant. Nous pensons comme le maire de Capestang qui s’est exprimé que l’on a mis la charrue avant les boeufs…”
Juste pied…
Maire de Péret et président des maires de l’Hérault, Christian Bilhac rejoint cette analyse. “Je prendrai ma décision d’ouvrir ou non mes écoles le 7 mai, confie-t-il. Si la situation sanitaire n’est pas bonne, avec des hôpitaux encore trop remplis de malades du covid-19, ce serait de la folie de les ouvrir. Nous sommes hors d’eau mais nous avons juste pied ; on a encore de l’eau au menton. Pourquoi a-t-on annulé toutes les festivités jusqu’au 14 juillet et on veut rouvrir les écoles avant ?”
Olivier SCHLAMA
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