Eau / Pollution : Quand les enfants font la leçon à leurs parents

Photo : Olivier SCHLAMA

(Avec vidéo). Bel exemple de sensibilisation à l’environnement dans les écoles de l’Agglopôle de Sète où 900 élèves participent à des ateliers. “Un programme sur-mesure” exemplaire visant aussi à éduquer les parents, comme le montre la restitution qui en a été faite ce vendredi après-midi à l’école Ferdinand-Buisson, à Sète…

Des emballages de gâteaux, des sachets en plastique, des papiers de toutes sortes… Très concernés, concentrés, sûr d’eux-mêmes et de la cause qu’ils défendent, Vaena, Mathis, ou encore Léïa n’ont pas eu la voix qui tremble au moment de la restitution d’une expérience éducative bien bâtie, à Sète, et qui donne des résultats positifs surprenants.

Déchets : 230 000 tonnes au fond de la Méditerranée…

Elle est baptisée Ici Commence la Lagune de Thau et vise à sensibiliser les habitants, via leurs progénitures à l’importance de ce bien commun qu’est l’eau. Surtout dans un environnement si fragile. Où tout se que l’on jette par un avaloir se retrouve instantanément dans l’étang de Thau ; où la Méditerranée souffre de pollution chronique, notamment aux plastiques : chaque année, quelque 230 000 tonnes de ces déchets finissent au fond de cette mer fermée, selon l’Union internationale pour la conservation de la nature (UICN)

Programme éducatif sur mesure

L’élue, Corinne Azaïs, est venue assister à la restitution à l’école Ferdinand-Buisson, à Sète. Ph. O.SC.

Dans la cour de l’école Ferdinand-Buisson, les élèves de CE2 de la classe de Véra Salas sont assis sagement sous le préau. Devant eux, l’évocation d’un énorme poisson recouvert de déchets accroché à un panneau de basket ; des tableaux noirs noircis de dessins dénonçant les pollutions, des injonctions à moins polluer, des dessins et autres concentrés d’une expérience qui dure depuis la rentrée de septembre et mobilise la conscience de ces enfants si adultes. C’est un programme élaboré, du “sur-mesure” par l’association Ardam et l’Agglopôle de Sète qui a débloqué 30 000 €. À raison de cinq journées-ateliers par classe où intervient un animateur  de l’Ardam.

“On ne croit pas que les déchet sont été “cachés” par le vent mais cachés par des personnes qui ont la flemme de les jeter à la poubelle…”

Mathis

Sur un tableau, simplement collés à la verticale, la présence de ces déchets étalés fait en soi une démonstration parlante. Mathis formule : “On a fait comme si on avait renversé le contenu d’une poubelle : on a ramassé tout ça en une matinée à l’école” ; et ces déchets étaient un peu cachés ; on ne croit pas qu’ils ont été “cachés” par le vent mais cachés par des personnes qui avaient la flemme de les jeter à la poubelle…On a fait tout ça pour dire aux gens d’arrêter de polluer et que ça leur donne envie de ne plus jeter les déchets par terre mais dans la poubelle.”

Je vous demande que ce soir vous fassiez l’inverse de ce qui se passe d’habitude : que vous leur appreniez les bons gestes pour préserver la planète”

Une matinée de déchets… Ph. O.SC.

“Les déchets, les animaux peuvent les avaler !”, avertit encore Léïa. “On a proposé des idées”, Vaena, 8 ans et demi. Conclusion, même un enfant peut faire la leçon à ses parents. Et ça marche. Élue à Sète et conseillère d’agglomération, Corinne Azaïs est tout sourire. “Je vous demande, appuie-t-elle, que ce soir vous fassiez l’inverse de ce qui se passe d’habitude quand vos parents vous font faire les devoirs à la maison : que vous leur appreniez les bons gestes pour préserver la planète.”

Au total 900 élèves sensibilisés

L’expérience d’une année scolaire trouvera sa place dans le journal de l’école Ferdinand-Buisson et de la maternelle Agnès-Varda qui la jouxte. Ce n’est pas la seule école qui profite de ce programme. Les élèves de Lakanal, Langevin et Renaissance, à Sète, le suivent. Ensuite ? Ce sera au tour de dizaines d’autres écoles dans les 14 communes de l’Agglopôle, soit au total 900 enfants de 35 écoles.

Cinq ateliers par classe volontaire sur le cycle de l’eau

“On a même fait des propositions…!” Vaena, 8 ans et demi. Ph. O.SC.

À chaque restitution dans une école, une plaque est posée. De quoi matérialiser ert mémoriser l’expérience. “Une quarantaine de plaques sont ainsi prévues à Sète, souvent à des endroits indiqués par les enfants eux-mêmes, soit une dizaine autour de l’école qui a participé à l’opération“, explique Valérie, de l’Agglopôle, soulignant que “les enfants sont ravis de participer à ce genre d’opération !”

Xavier, l’animateur de l’Ardam, précise que, “dans chaque classe participante, les ateliers ont pris, entre autres, la forme d’une enquête participative, très élaborée, montrant pas à pas le chemin de l’eau jusqu’au milieu naturel ; d’une explication poussée du cycle de l’eau ; de la réalisation d’une maquette-bilan matérialisant comment une ville gère l’eau sur son territoire…”

“Une convergence d’intérêts…”

La directrice de l’Ardam, Claudette Fareng rapporte n’avoir “eu que des retours positifs des enseignants et des parents sur ce programme d’éducation pédagogique”. Ce dernier est parti “d’une demande de la collectivité – sur proposition de Mèze – autour des enjeux de l’eau pluviale. Du ruissellement dans l’étang de Thau.” Ce programme d’éducation à l’environnement est aussi là pour expliquer que l’on ne vide pas son cendrier dans un avaloir car il va se retrouver directement dans l’étang…”

Photo : O.SC.

Claudette Fareng ajoute : “Ces ateliers fonctionnent bien aussi parce qu’il y a une convergence d’intérêts : le cycle de l’eau est au programme du CE2 ; chaque outil est créé par l’animateur de l’Ardam ; ces poses de plaquent permettent aux enfants de s’approprier le territoire puisqu’ils peuvent proposer d’en poser à côté d’un marché, d’une école, etc. Et chaque classe est libre d’en faire la restitution qu’elle veut : nous en avons déjà eu sous forme de pièce de théâtre, d’exposition…”

844 millions de Terriens privés d’eau potable

On est encore loin de l’évocation des grandes pollutions qui maltraitent durement la planète ; des quelque 844 millions de personnes privées de tout service élémentaire d’eau potable ; de ces 1,8 milliards d’êtres humains qui n’ont pas d’autre choix que de boire l’eau non dépolluée et 4,5 milliards – souvent les mêmes – qui ne peuvent se servir de “toilettes sûres…”, comme le rapporte la Banque mondiale dans son rapport de 2019. Sans parler de trois polluants majeurs : l’azote est liée à la prolifération des engrais ; le sel augmente à cause des sécheresses intenses de part le monde. Sans oublier le plastique… Mais les petits ruisseaux font les grandes rivières…

Olivier SCHLAMA

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