Consommation : De nouvelles habitudes, liées à l’impact de la crise sanitaire

Drive, livraison à domicile, de novelles solutions de consommation pour les confinés... Photo D.-R.

Confinés, assignés à résidence, soumis au couvre-feu, nécessité fait loi, les Français se  sont projetés depuis un an dans un usage tous azimuts du numérique. Et de nouvelles expressions ont fait leur apparition : “stay at home”, “click and collect”… Au grand dam de tous ceux qui privilégient les contacts humains. Mais ce bouleversement peut aussi s’accompagner parfois d’une volonté de consommation éthique, comme le soulignent diverses expériences telles que le Drive Tout Nu en Haute-Garonne ou La Palanche dans l’Hérault.

Plébiscité par les consommateurs toulousains depuis son ouverture en 2018, le Drive tout nu a connu des pics de fréquentation inédits depuis le début de la crise sanitaire et séduit de nouveaux clients en quête de solutions de consommation plus responsables”, soulignent Salomé et Pierre Géraud à l’origine du concept.

S’approvisionner “local”, + 5% depuis un an

Plus de 140 fournisseurs autour de Toulouse pour Le Drive Tout Nu. Photo archives © Le DTN

Confirmant ainsi les conclusons d’une enquête menée par l’Echangeur BNP Paribas Personal Finance. auprès de 5000 français. Celle-ci révèle notamment que “la crise sanitaire a fait évoluer de manière durable les pratiques des Français en matière d’achats alimentaires. Alors qu’ils sont 41% à s’être approvisionnés auprès de producteurs locaux au cours des douze derniers mois (+ 5 points par rapport à janvier 2020), ils sont 21% à vouloir acheter davantage sur les marchés ou en direct et 15% à souhaiter se rendre plus souvent dans des magasins spécialisés en bio. A contrario, respectivement 26% et 24% des consommateurs envisagent de réduire leur fréquentation dans les hypermarchés et les supermarchés.”

Le “drive” devient une habitude

La grande distribution classique pourrait bien, d’ailleurs, être une victime colatérale de cette crise sanitaire et du bouleversement des ces habitudes de consommation… Et cela malgré l’explosion du drive qui de entre janvier et septembre 2020 a connu une véritable explosion :

En effet, 43 % des Français ont eu recours au drive (34%) ou à de la livraison alimentaire à domicile (16 %) au cours de ces mêmes douze derniers mois, soit une progression de 16 points par rapport au sondage de janvier 2020. Ces services semble désormais avoir vocation à s’ancrer durablement dans les pratiques des Français puisqu’ils sont 45% à avoir l’intention de les utiliser plus fréquemment.

Les plus de 60 ans s’y mettent aussi

Au Drive Tout Nu, on constate que “le local, est un argument qui revient souvent dans la bouche des clients (…) Le 17 mars 2020, lendemain de l’annonce du confinement par le Président de la République, Le Drive tout nu était pris d’assaut. Des habitués et de nouvelles têtes désireuses de soutenir les producteurs locaux, éprouvés par la crise sanitaire, d’adopter un mode de consommation plus respectueux de l’environnement et de s’alimenter plus sainement. Une tendance qui ne s’est pas tarie depuis !”

“Notre étude a également interrogé les Français sur la société actuelle et son avenir. Il en ressort que c’est le localisme qui apparait comme la meilleure réponse face à la crise. Il est particulièrementmis en avant par les plus de 60 ans (40% contre 31% pour la moyenne des Français). Patriotisme local, traçabilité, indépendance, écologie… cette logique coche toutes les cases et réassure face au sentiment de perdre pied. L’innovation technologique apparait a contrario plus suspecte que salutaire face au manque de maitrise et aux effets d’un progrès où l’humain n’aurait plus sa place” conclut  Caroline Veyret Prudhon, responsable des Etudes Consommateurs chez l’Echangeur BNP Paribas Personal Finance.

Le Drive « zéro déchet » La palanche est à l’origine de la création du premier réseau de drives « zéro
déchet » de l’Hérault. Photo © (LA PALANCHE

Et de constater que : “Parmi les nouveaux adeptes du drive et de la livraison alimentaire à domicile, ce sont les seniors qui ont connu une progression d’utilisation la plus importante. La part des plus de 60 ans ayant adopté ces services a en effet plus que doublé entre janvier et septembre 2020 : 37% y ont eu recours au cours des 12 derniers mois (vs 15% lors de la vague de janvier).”

Le “passage à l’acte” de La Palanche

C’est dans ce contexte, en septembre 2020 que La Palanche a ouvert ses portes au nord de Montpellier (à Saint-Gély-du-Fesc). Ce drive éco-responsable est ouvert tous les jours du lundi au samedi “jusqu’à nouvel ordre (ou contre-ordre !)”, précisent les responsables. Une équipe de 4 personnes qui se connaissaient déjà depuis fort longtemps pour la plupart et qui se sont rejointes dans la volonté de contribuer à la transition écologique. Avec leurs moyens et leurs possibilités, mais dans l’idée de “se décider plus actifs qu’uniquement contestataires.”

Un beau symbole pour une époque qui en a bien besoin…

Philippe MOURET

On vous en parle davantage :

Le Drive Tout Nu

Après son premier site à Beauzelle, le Drive Tout Nu a ouvert son deuxième drive zéro déchet à Balma-Gramont dans l’est de Toulouse le 26 novembre 2020. Un troisième, devrait voir le jour en ce début de 2021 (à Montraudran). Ainsi, presque deux ans après avoir fait sensation en inaugurant leur concept unique au monde de drive zéro déchet, Salomé et Pierre Géraud, proposent près de 800 références provenant, pour plus des trois quarts, d’un rayon de 100 km autour du drive.

Ils sont plus de 140 producteurs autour de Toulouse à continuer de suivre Le Drive tout nu dans son développement et dans la promotion du zéro déchet. “Nous ne travaillons qu’avec des producteurs qui acceptent de nous livrer en vrac ou en 0 déchet”, précise Pierre Géraud, ingénieur agricole en charge du choix des produits.

“Tous nos produits sont conditionnés dans des contenants réutilisables : bocaux et sacs en tissus”, poursuit-il. Autre condition de sélection des produits : la qualité. L’entreprise a défini strictement les critères de choix de ses fournisseurs. Ils lui permettent de s’émanciper des labels quand nécessaire – pour favoriser le local par exemple.

Le Drive tout nu Balma-Gramont
Adresse : 4 rue Théron de Montaugé, 31200 Toulouse
Horaires : du mercredi au vendredi de 10h à 19h, le samedi de 9h à 18h
Contact : coucou.balma-gramont@ledrivetoutnu.com

Le Drive tout nu Beauzelle
Adresse : 286 rue de la Sur, 31700 Beauzelle
Horaires : du mercredi au vendredi de 10h à 19h, le samedi de 9h à 18h
Contact : coucou.beauzelle@ledrivetoutnu.com

La Palanche

La Palanche est un drive zéro déchet pour tous les budgets. Ainsi, pour au minimum 10 produits de base dès l’ouverture, les clients peuvent faire leur choix entre un produit à tarif bas (référentiel discount) de la meilleure qualité possible et un produit à tarif plus élevé, de qualité supérieure et bio.

Et le drive fonctionne sous forme de consigne inversée : les bocaux et sachets dans lesquels sont préparées les commandes sont offerts, avec une incitation des clients à les ramener pour les remettre dans le circuit et les réutiliser. Cette incitation passe par un bon d’achat de 10 cts donné au client pour chaque restitution de bocal. L’objectif est de n’exclure personne par le coût que représenterait une consigne plus classique où le client avancerait le coût du bocal.

La Palanche propose des produits d’épicerie, des cosmétiques, des produits d’entretien mais aussi des produits frais. Pour faire ses courses, c’est simple ! Il suffit de se connecter sur le site www.lapalanche.fr : la première fois il faut créer un compte, les fois suivantes il suffira de se connecter. Le client choisit le lieu, la date et l’heure auxquels il souhaite récupérer ses courses.

La palanche bénéficie de l’accompagnement d’Alter Incub pour sa création. Il est également soutenu par la Région Occitanie, le projet est arrivé en 4ème position sur 120 de l’appel à projets organisé en 2019 sur le thème de l’économie circulaire et de la réduction des déchets. Depuis l’été 2020, La Palanche est aussi soutenue par France Initiative Pic Saint Loup.

Digitalisation de la consommation, l’enquête :

L’enquête “Comment la crise a impacté la digitalisation des consommateurs français et leur vision de l’avenir” réalisée par l’Echangeur BNP Paribas Personal Finance donne d’autres indications. Et s’il semble que la crise sanitaire ait fait évoluer de manière durable les pratiques des Français en matière d’achats alimentaires, cette tendance touche de nombreux autres domaines.

Ainsi, la crise a engendré un accroissement notable de la fréquence d’achat. 71% des acheteurs online ont ainsi réalisé des achats sur Internet au moins une fois par mois, soit une progression de + 5 points par rapport à la vague de janvier. 26% d’entre eux considèrent d’ailleurs que la crise va les encourager durablement à augmenter leurs achats en ligne.

Le boom des services de vidéo à la demande

Le “stay at home” et les plateformes de SVOD ont le vent en poupe. photo D.-R.

L’étude montre également que des pratiques déjà bien installées se sont renforcées : à titre d’exemple, en septembre 2020, 50% des Français connectés déclarent utiliser un service de vidéo à la demande (SVOD) sachant que 1 sur 5 ont testé Netflix, Amazon Prime Vidéo ou Disney+ pour la première fois lors de la crise. De quoi nourrir les inquiétudes des salles de cinéma, déjà vicitmes des choix sanitaires parfois difficiles à comprendre de l’Etat.

En parallèle, d’autres pratiques ont connu un boom spectaculaire, directement engendré par l’urgence liée à la Covid-19. C’est le cas de la télémédecine : 26% déclarent y recourir dont près des deux tiers d’entre eux (17%) ont franchi le pas suite à la crise. Il en va de même pour le télétravail : 53% des actifs le pratiquent dont  plus de la moitié  l’ont expérimenté pour la première fois.

La première vague de confinement a finalement préparé les Français à intégrer de manière plus pérenne et surtout plus intense les nouveaux usages digitaux. Télétravail, téléconsultation, SVOD, jeux en ligne, réseaux sociaux…ils n’envisagent pas de retour en arrière possible : dans 7 à 9 cas sur 10, ils estiment qu’ils vont maintenir, voire augmenter leurs usages.

Le digital souligne certaines inégalités

Par contre, cet engouement ne profite qu’à une partie de la population plus à l’aise sur la prise en main du digital et son financement. Ainsi, si les deux tiers des 18-30 ans jouent à des jeux vidéos en ligne (66%), les seniors restent peu enclins à pratiquer ce loisir, dont ils ne connaissent pas les codes (19%).

De plus, 62% des hauts revenus (plus de 4 000€ nets mensuels par foyer) utilisent des services de vidéo à la demande contre respectivement 47% et 48% des catégories aux revenus bas ou moyens. La  télémédecine illustre quant à elle une fracture territoriale : 39% des urbains (habitants des villes de plus de 100 000 habitants ou en agglomération parisienne) y ont recours, contre 18% des ruraux (moins de 2000 habitants).

Enquêtes menées en ligne par Kantar auprès de plus de 18.000 d’individus âgés de 18 ans et plus représentatifs de la population de France, Belgique, Portugal et Espagne. Plus précisément en France, c’est 5.000 personnes qui ont été interviewées en janvier 2020 et 1.000 début septembre pour mieux analyser les impacts du confinement sur leurs comportements et opinions.