Chasse à la tourterelle des bois maintenue : Pour la LPO, il faut un “Cessez le feu !”

tourterelle des bois. Ph. Fabrice Cahez

La chasse à la tourterelle des bois a rouvert le 29 août pour quelques semaines. Une aberration pour les associations de défense de l’environnement, dont la LPO, l’Europe et les scientifiques. Pas pour la ministre de l’Écologie…

Réactualisé. Vendredi 11 septembre 2020, le juge des référés du Conseil d‘État vient de suspendre, à partir de ce soir, la chasse des tourterelles des bois sur tout le territoire français.

Présente notamment en Haute-Garonne et le Tarn, la tourterelle des bois a vu sa population diminuer de façon inquiétante. En net déclin, cet oiseau sera encore chassé cette année, notamment sur le pourtour méditerranéen, au grand dam des associations de défense de l’environnement, dont la LPO, et la Commission européenne. La décision a été prise au moment où l’Élysée décidait de suspendre la chasse à la glu qui consiste à enduire de colle des branches d’arbres pour piéger grives et merles noirs pour en faire des “appelants” pour que les chasseurs tirent d’autres oiseaux.

Après la suspension de la chasse à la glu, on peut imaginer que l’exécutif a fait un cadeau inacceptable aux chasseurs sur la tourterelle des bois…”

Allain Bougrain-Dubourg, président de la LPO

La population de la tourterelle des bois a décru de… 80 % depuis les années 1980 : l’espèce est classée “vulnérable” par l’Union internationale pour la conservation de la nature (UICN). Et pourtant… Jeudi 27 août, le ministère de l’Écologie a signé un arrêté autorisant un prélèvement de 17 460 de ces oiseaux-là, espèce en fort déclin. La Ligue de protection des oiseaux (LPO) a immédiatement déposé un recours en référé devant le Conseil d’Etat. Pour Allain Bougrain-Dubourg, président de la LPO, cette action vise à essayer de “suspendre cette décision indigne. L’Europe dit : “Cessez-le feu !” ; la consultation citoyenne effectuée par le ministèrea dit la même chose avec l’écrasante majorité de 75 %. Cela montre que l’on méprise la société, la science et les politiques.” Allain Bougrain-Dubourg ajoute : “Après la suspension de la chasse à la glu, on peut imaginer que l’exécutif a fait un cadeau inacceptable aux chasseurs sur la tourterelle des bois…”

Très chassée, destruction des habitats, pesticides

L’espèce a beaucoup décliné en France depuis les années 1970. Deux raisons principales : elle est très chassée lors de ses passages dans les régions méditerranéennes. À cela, il faut ajouter la dégradation de son habitat due à la destruction des haies et l’utilisation massive de pesticides dans l’agriculture.

Du côté de la LPO, on s’insurge : “En 25 ans, on est passé de 30 000 reproducteurs à 5 000 seulement ! Est-ce si important que ça d’en laisser encore chasser 17 000 à 18 000  alors qu’il y a tant d’autres espèces chassables en France (record avec 60 espèces chassables, le double de la moyenne des pays Européens…) Faut-il là encore laisser l’Europe endosser la responsabilité de mener la France devant la Cour de justice de l’Union européenne (l’infraction est ouverte, la mise en demeure effective, l’avis motivé à la rentrée fort probable) au risque de favoriser le populisme europhobe ?” Et d’ajouter : “Les scientifiques avaient préconisé un quota zéro. Et c’est seulement parce que la ministre leur a demandé de donner un chiffre positif au cas où il y aurait obligation de chasser cette espèce qu’ils ont publié ce chiffre de 18 000.”

Procédure d’infraction contre la France

La LPO va plus loin : “Et peu importe que la Commission européenne ait demandé en 2018 aux États membres de suspendre la chasse de cet oiseau. Peu importe l’ouverture d’une procédure d’infraction contre la France sur ce même sujet en juillet 2020. Peu importe que le Comité des experts de la gestion adaptative ait conclu en mai 2019 et réitéré en juin  2020 sur la nécessité de stopper la chasse de cette espèce.”

Selon le ministère de la Transition écologique et solidaire, cette mesure permettra de diviser par cinq les prélèvements de cette espèce, estimés à 92 000 oiseaux par an. Les chasseurs ont l’obligation de déclarer chaque prise, notamment via une application, ChassAdap.

Contactée, la Fédération nationale des chasseurs était injoignable.

Olivier SCHLAMA

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