Bande dessinée : Une nouveauté signée Devig et les coups de coeur 2022

Les mystérieuses histoire du major Burns, Tome 2... aux éditions Fluide Glacial. Détail de la couverture

Londres, 1885. Le Major Burns et son acolyte, le docteur Wayne, vont et viennent aux quatre coins du Royaume, afin de résoudre les plus sombres mystères de cette fin du XIXe siècle britannique. La légende des chiens noirs, le monstre du Loch Ness ou même l’homme-rat… Une bonne dose de chance, deux cuillères de flegme et une pincée d’humour noir : c’est la recette qui permettra à ces deux (z)héros de venir à bout, miraculeusement, des mystères les plus insolubles.

Quand Sherlock Holmes et son inséparable docteur Watson étaient subtils, cultivés et humanistes, le major Burns et le Dr Wayne sont incompétents, lâches et cyniques… Et c’est bien pour ça qu’on les aime ! Après un premier tome aux savoureuses saveurs de pudding et d’humour noir, l’auteur toulousain Devig réussit le tour de force de faire encore mieux !

Devig déploie une véritable galerie de monstres

Devig, un auteur qui sait allier l’élégance de la ligne claire au effets les plus gores ! Mais qu’est-ce qui se cache vraiment derrière ces lunettes !? Photo DR

Les mystérieueses histoires du major Burns sont donc de retour, pour un deuxième opus. Et avec lui, toute une galerie de monstres aussi pervers que pathétiques, même la pire de tous, l’intrigante voleuse française dîte La Pie, Et c’est avec délices que l’on se plonge dans cette Angleterre du XIXe siècle, férue de spiritisme, de fantômes et de vampires !

Et quel plaisir de sillonner en compagnie de ces deux enquêteurs particulièrement maladroits, les landes battues par le vent, les docks crasseux de Southwark, les Lochs d’Ecosse et les plus sombres méandres de l’âme humaine.

“Le saviez vous ?” et couvertures à l’ancienne

Au fil des albums, Devig peaufine un style qui n’appartient qu’à lui, fidèle à une élégante tradition de ligne claire, mais avec juste ce qu’il faut de “gore” pour ne pas s’enfermer dans le bon goût.

Ces histoires courtes s’enchaînent avec brio, avec quelques savoureux intermèdes sur le mode des rubriques “Le saviez vous” des BD de gare en petit format des 60’s…

L’occasion d’en savoir plus sur le monstre du Loch Ness, l’inquiétante abbaye de Carfax, ou l’incroyable (mais vraie !) London Necropolis Railway, une ligne de chemin de fer ouverte pour transporter les corps des défunts et les personnes en deuil entre Londres et le récemment ouvert cimetière de Brookwood à 23 miles (37 km) !

Autour du major Burns et du docteur Wayne, c’est tout un univers que développe l’auteur (qui signe scénario, dessin  et couleur) dans ce tome 2 d’une série qui semble promettre encore bien de sanglantes péripéties. La présentation s’est enrichie de superbes fausses couvertures à l’ancienne des “Mysterious Stories” (by Frozen Fluid).

Un véritable plaisir de lecture de la première à la dernière page, à savourer accompagné d’une tasse de thé et de quelques scones encore chauds… Quoiqu’avec le major Burns, allez savoir de quoi seront garnies les pâtisseries et si le goût du thé ne cache pas quelque poison mortel !? Mais ne faut-il pas vivre dangereusement ? Of course !!!

Philippe MOURET

Les mystérieuses histoire du major BurnsDevig – éd Fluide Glacial – 15,90 € – Sortie le 11 janvier 2023.

Coups de coeur 2022 :

La dernière ReineRochette – Casterman

Gueule cassée de 14, Édouard Roux trouve refuge dans l’atelier de la sculptrice animalière Jeanne Sauvage. Elle lui redonne un visage et l’introduit dans le milieu des artistes de Montmartre. En échange, Édouard lui fait découvrir la majesté du plateau du Vercors et l’histoire du dernier ours qu’il a vu tué quand il était enfant.

Au cœur du Cirque d’Archiane, il lui dévoile la Dernière Reine et incite Jeanne a créer le chef d’œuvre qui la fera reconnaître. Dans la veine des grands romans feuilletons du 19e, La Dernière Reine croise les destins du dernier ours du Vercors et d’Édouard Roux gueule cassée de 14.

Comme précédemment dans Le Loup, homme et animal se confrontent dans un récit puissant, mêlant questionnements écologiques, féminisme, histoire d’amour et histoire de l’art.

1629… ou l’effrayante histoire des naufragés du JakartaDorison / Montaigne – Glénat

Seuls les désespérés prennent le risque de s’embarquer sur le Jakarta. À son bord, un équipage issu des bas-fonds d’Amsterdam et assez d’or et de diamants pour exciter les plus folles convoitises. Un baril de poudre sur un enfer flottant. Invitée improbable dans cette traversée vers le cauchemar, Lucrétia Hans devient la seule à pouvoir empêcher Jéronimus Cornélius, apothicaire hérétique et ruiné, d’allumer la mèche… Bon voyage !

Premier tome d’un diptyque consacré à l’une des pages les plus sanglantes de l’histoire maritime, ce thriller psychologique revient sur un récit effroyable où se sont mêlés mutinerie, naufrage, massacre et survie. En se focalisant sur ce microcosme sordide, Xavier Dorison signe autant un récit d’aventure magistral qu’une galerie de portraits sur la noirceur de l’âme humaine, magnifiquement illustré par un Thimothée Montaigne au sommet de son art.

Bartleby, le scribeMunuera – Dargaud

New York City, quartier de Wall Street : Un jeune homme est engagé dans une étude de notaire. Il s’appelle Bartleby. Son rôle consiste à copier des actes juridiques.

Les premiers temps, Bartleby se montre irréprochable. Consciencieux, efficace, infatigable, il abat un travail colossal, le jour comme la nuit, sans jamais se plaindre. Son énergie est contagieuse. Elle pousse ses collègues, pourtant volontiers frondeurs, à donner le meilleur d’eux-mêmes.

Un jour, la belle machine se dérègle. Lorsque le patron de l’étude lui confie un travail, Bartleby refuse de s’exécuter. Poliment, mais fermement. I would prefer not, lui répond-il. Soit, en français : je préfèrerais ne pas. Désormais, Bartleby cessera d’obéir aux ordres, en se murant dans ces quelques mots qu’il prononce comme un mantra. “Je préfèrerais ne pas.” Non seulement il cesse de travailler, mais il refuse de quitter les lieux…

José Luis Munuera s’empare de la nouvelle d’Herman Melville dans une adaptation magistrale et porte un regard original sur ce texte, réflexion stimulante sur l’obéissance et la résistance passive.

Manchuria Opium Squad Tsukasa Monma / Shikako – Vega Dupuis

Une plongée dans la folie d’une Manchourie déchirée par la guerre de l’opium, et le parcours d’un agriculteur naïf dans un monde de requins impitoyables.

Ce manga offre une vision de la guerre de l’opium dans l’Asie du Sud-Est. Entre domination japonaise et britannique, intérêts des mafias chinoises, trafics en tous genres, la Manchourie est un pays ravagé par les conflits. Illustré avec talent et sens du réalisme, le manga est poignant de vérité.

Dans le tome 7 (le 8 à paraître en mars 2023) les héros semblent avoir échappé de justesse au péril représenté par les mafia chinoise et russe, Lihua a été soignée de sa blessure, et tous trouvent refuge dans un bar tenu par une femme médecin. Kyril a accepté de rejoindre le groupe, et les voici en quête d’un nouveau contact pour écouler leur opium dans la ville de Jilin.

Pourtant, la menace resurgit en la personne du caporal japonais sadique, toujours sur les traces d’Isamu, et qui finit par manquer de capturer Bataar et Kyril. Ce dernier désire en vérité capturer Isamu vivant et s’emparer de sa formule pour produire de l’opium, vendu ensuite par son gouvernement.

Ph.M.

Devig, une carrière à suivre !

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