Arts : Face aux restrictions, les musiques (encore) vivantes réagissent

Un concert en version debout de Georgio (rap), sur la scène du Rio Grande. photo DR - RIO GRANDE

Deux ans que ce secteur vit au rythme des “stop and go”, devenus en réalité des “stop and stop”, c’est ainsi que le Prodiss (syndicat national du spectacle musical et de variété) commente les restrictions qui touchent arbitrairement certains secteurs, particulièrement le spectacle vivant avec l’interdiction des concerts debouts… “Lassé et en colère d’une situation qui a bien trop duré”, le secteur des musiques actuelles dénonce une “nouvelle stigmatisation, ouvertement inéquitable” et exige “une reprise des concerts debout dès le 24 janvier.”

Dès l’annonce des nouvelles restrictions sanitaires touchant les concerts, de nombreux artistes (Eddy de Pretto, Hoshi…) avaient ironisé sur les nouvelles règles imposées à la musique vivante mais… pas aux meetings politiques. Tel, aussi, le gardois Julien Doré, détournant l’affiche de sa tournée pour annoncer qu’il ne serait donc plus “en concert” mais “en meeting”

Le logo de la pétition actuellement en cours sur change;org

Mais au-delà de l’humour, c’est une réelle inquiétude qui anime de nombreux lieux de concerts. Exemple parmi tant d’autres, avec Le Rio Grande à Montauban (Tarn-et-Garonne) qui invite tous les publics à signer la pétition “les concerts assis, ça ne tient pas toujours debout.”

Une “stigmatisation” à l’égard des lieux consacrés aux musiques actuelles ?

Et d’expliquer : “L’association le Rio réaffirme sa volonté de soutenir tous les artistes des musiques actuelles en poursuivant ses missions d’accompagnement, de découverte et de diffusion. Le Rio Grande reste accessible au public, en dépit des contraintes imposées par l’État, qui stigmatisent, une fois de plus les lieux de diffusion et de création de musiques actuelles, en interdisant la tenue de concerts debout, ainsi que la vente et la consommation de boissons propice à la sociabilisation et à la convivialité, valeurs intimement liées à notre activité et particulièrement nécessaire dans le contexte actuel.”

De ce fait, le fonctionnement du Rio Grande “avec une configuration en places assises et une buvette fermée impacte profondément l’équilibre financier de l’association, représentant près de 33% d’insuffisance budgétaire.” Autre conséquence : “Certaines esthétiques artistiques (rap, métal, électro) ne pouvant être transposées dans un contexte assis, l’association a dû se résoudre à recaler des spectacles sur plusieurs mois, sans certitude de pouvoir aboutir l’événement, ce qui ajoute un surcroît de travail dans l’équipe et une usure depuis bientôt deux ans, sans avoir de perspectives à moyen terme.”

Menaces sur les lieux, mais aussi les emplois

Concert de Last Train (rock) à Montauban, Le Rio Grande. Une envi de vivre… Photo : @emilietphotos

Enfin, les équipes mobilisées sur les spectacles, artistes et techniciens, en tournée ou à domicile, “se retrouvent une fois de plus impactées, alors que la plupart subissent déjà les contraintes de précarité liées à leur statut d’intermittent, et que le dispositif de soutien d’année blanche vient de s’arrêter, et risquent plus encore de précarisation dans les mois à venir. Dans ces conditions d’activité, ce sont près de 8 emplois d’artistes et techniciens qui ne pourront être consolidés, et un enjeu de 5 permanents en CDI.”

L’association rappelle aussi que “à travers chaque action du Rio Grande, s’opère un retour à l’économie locale, vers les commerces et artisans (restaurateurs, grande et petite distribution, hôtels, imprimeurs, fournisseurs de boissons…) qui est également perdu ou reporté dans ce contexte certes transitoire, mais sans véritable date butoir dans le temps.”

Les concerts, pas plus “à risque” que les grandes surfaces

On perçoit, le profond sentiment d’incompréhension et d’absence d’écoute envers les professionnels concernés : “Pleinement conscients des enjeux liés à la crise sanitaire, nous souhaitons réaffirmer notre capacité à prendre nos responsabilités d’accueil du public et des usagers de l’association dans le respect de consignes adaptées et renouvelons notre plus fort mécontentement devant ce manque d’écoute et de respect qui vise à jeter le doute sur nos compétences et notre sérieux en la matière. Ces contraintes visent nos pratiques et nos moeurs, alors même que des études scientifiques ont prouvé qu’assister à un concert n’est pas plus dangereux -voire moins- que d’emprunter les transports en commun ou de faire ses courses dans une grande surface.”

Campagne nationale et pétition : “Les musiques actuelles sont un des maillons de la culture de notre pays, font partie des loisirs préférés des Français, cultivent, éduquent, permettent de découvrir et accepter l’autre, et créent du lien social, autant que de la richesse et des emplois”, souligne l’association le Rio, qui s’associe à la campagne nationale lancée par le SMA (syndicat des musiques actuelles) et la Fédélima (Fédération des lieux de musiques actuelles), qui dénonce “le traitement inéquitable réservé aux acteurs des musiques actuelles et appelle à la reprise des concerts debout dès le 24 janvier 2022…”

pour soutenir cette initiative, signer la pétition : https://chng.it/wRVmXpTCCt #concertsdebout.

Philippe MOURET

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