Justice : dans le Gard, les abattoirs au banc des accusés

Image de l'abattoir du Vigan. Photo L214 - Éthique & animaux.

Ce jeudi 23 mars s’ouvre le procès d’un abattoir certifié bio du Vigan, dans le Gard, au tribunal correctionnel d’Alès.

Ce sera le premier procès ayant à juger des sévices graves et actes de cruauté dans un abattoir en France. Sur le banc des prévenus, la communauté de communes du Pays Viganais, gestionnaire de l’abattoir, ainsi que trois employés de l’abattoir. Un est renvoyé pour les délits d’ »acte de cruauté et sévices graves », les deux autres pour des faits de « mauvais traitements sur animaux »… Ce procès fait suite à la diffusion par l’association L214 de vidéos tournées dans cet abattoir entre juin 2015 et février 2016.

Moutons à l’abattoir du Vigan. Photo L214 – Éthique & animaux

On y voyait notamment des moutons violemment projetés contre des barrières, un employé s’amuser à leur infliger des décharges électriques, des animaux mal étourdis et conscients sur la chaîne d’abattage, du matériel défaillant : des scènes intolérables violant la réglementation et causant d’importantes souffrances supplémentaires aux animaux.

Mesures gouvernementales insuffisantes

C’est à la suite de la diffusion des images de l’abattoir d’Alès, de celui du Vigan, puis de l’abattoir de Mauléon-Licharre dans les Hautes-Pyrénées, que le ministre de l’Agriculture Stéphane le Foll a ordonné en mars 2016 une inspection généralisée dans tous les abattoirs d’animaux de boucherie. Une commission d’enquête parlementaire a alors été nommée dont les conclusions ont abouti le 20 septembre 2016 à la préconisation de 65 mesures dont le renforcement de la vidéo-surveillance et la formation des employés.

Le rapport prévoit également un renforcement des services vétérinaires. Mais le recrutement de 60 agents en 2016 et 60 autres en 2017 est jugé bien insuffisant par les experts qui évaluent les besoins à… 500 postes supplémentaires.

Comme le précise Laurent Lasne, président du Syndicat national des inspecteurs en santé publique vétérinaire, l’essentiel de la mission des vétérinaires dans les abattoirs consistent à repérer les maladies contagieuses et s’assurer de la sécurité sanitaire de la viande mise sur le marché…

Les circuits courts n’apportent pas de garantie

De toute façon, nul ne pense que les contrôles soient suffisants. Et il demeure très difficile d’obtenir des garanties sur l’abattage du bétail. « Il y a très peu de garanties, même si vous achetez une viande avec une indication géographique protégée (IGP) ou de qualité comme le label Rouge ou le label Agriculture biologique », souligne une étude du magazine 60millions de consommateurs qui souligne que « les circuits courts n’apportent pas non plus la garantie d’une meilleure prise en considération des animaux ».

les cochons, aussi. L214 – Éthique & animaux

« Sur le papier, l’abattoir du Vigan correspond pourtant à l’abattoir rêvé : petit abattoir local avec de faibles cadences d’abattage, circuits courts, animaux issus de filières certifiées… La réalité est dure et violente. Comment peut-on demander à des employés de bien se comporter avec les animaux quand leur travail consiste à les mettre en pièces avec des couteaux ? Ce procès devra établir la responsabilité de chacun. Nous aimerions qu’il soit aussi l’occasion pour chacun de s’interroger sur la légitimité de continuer à tuer des animaux alors que cette pratique ne répond à aucune nécessité nutritionnelle », assure ainsi la porte-parole de L214, Brigitte Gothière.

Le procès d’Alès dure deux jours, jeudi 23 et vendredi 24 mars…

Philippe MOURET